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9 février 2008 6 09 /02 /février /2008 13:40

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La première chose qui m'étreint : une forme de retour à la vie après la trilogie Elephant, Gerry et Last Days, ceci ne constituant ni une qualité ni un défaut en soi, cela va sans dire, et c'est pourquoi je le dis, comme d'hab' quoi... Van Sant lui-même - que ses détracteurs auraient tôt fait d'appeler l'autre Gus - parle de ses trois précédents films comme d'une méditation sur la mort.

Aussi je ne vois aucune afféterie dans l'organisation du récit de cette nouvelle proposition, en dehors même de sa simple justification narrative (danse !, danse !, autour du déni). Si, pour faire court, les trois films précédents traçaient un long chemin vers la mort, Paranoïd Park ne pouvait ni commencer ni se terminer par elle. Il est ici avant tout question de la possibilité de vivre. Avant et après.

De la possibilité d'affûter ses mouvements.

Surtout : de la possibilité d'écrire.

Et en deça/au-delà de tout ça.


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Petit flash info pour allumer un projecteur sur d'où je parle et, sans doute, ce qui me dépasse : Elephant et, sans doute, Gerry restent les plus beaux films de Van Sant à mes yeux. Et je garde cette tendresse particulière pour Will Hunting et Finding Forrester. Bon.

Autre flash : le skate-board m'intéresse spontanément autant que le macramé, je n'ai aucune fascination pour l'adolescence, ni même pour la " jeunesse ", en temps qu'âge - cela viendra avec (l'âge) sans doute -, etc…

Enfin, au-delà de ce qui m'attire spontanément ou pas, il y a quand même pas mal de choses qui m'agacent dans ce film, que je trouve ratées, et loin de l'ampleur et de la grâce d'Elephant

Et alors ?

Je trouve que : c'est un vrai beau film. Et vivant. Qui trébuche peut-être parfois, sûrement. Qui court après la grâce autant qu'il ne l'attrape, ce n'est pas à exclure, etc… Je m'en fous. Ce n'est pas le film de l'année ? Je ne crois pas non plus. N'empêche que : je n'en vois pas des comme ça tous les jours (et pas seulement parce que je ne me rends pas quotidiennement en salle, hein !). Est-ce que je l'aime ? Je n'en sais rien. Mais : je suis nourri ET ma faim est préservée, aiguisée…


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Déjà, je prends l'invitation du générique avec bonheur : très beau plan sur un pont avec une musique qui m'évoque doucement Gershwin - je n'y connais rien en musique - jusqu'à la main du jeune homme qui trace au crayon, et dans le creux de mon oreille, le titre, que je crois encore être avant tout celui du film…

Très vite un chien saute au cœur d'un chemin dans des herbes hautes, et un plan magnifique d'Elephant me submerge presque. Celui-là, très différent, résiste. Tout va bien.

Me frôlent donc, aussitôt, les volutes des skaters, comme un sur-place aérien et presque une envolée à la fois, ainsi qu'un chemin, qui, aujourd'hui, ne mènera pas à la mort. Il en part. Nous partons. Au bord de la mer. Au bord du ciel. Horizontal et vertical, mais comme en spirale… Si c'est pas d'la balle ! Mais ressaisissons-nous.

Alors, ce plan que je trouve très beau, immergé, comme en apnée, entre l'aller et le retour d'Alex  dans le couloir du lycée. Magic Moment(s) également, à mes yeux... L'adolescent, Alex donc, est convoqué par un inspecteur. La porte s'ouvre. La pièce est vide. Recadrage : l'inspecteur apparaît. Commence à s'entrevoir ce qui était refusé, quelque chose comme ça. Le plan continue, stabilisé : Alex vient s'asseoir, en face de l'inspecteur à l'image. Le plan continue dans une longue approche jusqu'au gros plan d'Alex : c'est là que nous savons que c'est lui, le " coupable ", et nous sommes avec lui,  et au moment où l'on va basculer sur un contrechamp - l'inspecteur -, on entend le cri, à peine - c'est aussi ce que je trouve magnifique -, le hurlement de la victime accidentelle. Bien sûr, c'est assez explicite. Ou seulement ma lecture. En même temps, je ressens quelque chose de magistral là-dedans, en quelques secondes…

Comme ça revient… 


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Alex dans sa voiture, avec la ville dans le dos, écoute de la musique en conduisant. Différentes musiques : différentes présences d'Alex. Jusqu'au sourire : presque étonnant. Ce serait bête comme chou. Et ça me fout par terre. Et tout le contraire.

La "communauté des skaters" est convoquée par l'inspecteur. Un doux panoramique les parcourt quand ils sont assis face à lui. Alex est là mais reste le seul qu'on ne peut pas voir. Presque une disparition. Comme il le souhaiterait sans doute…

Ce qui me touche vraiment dans cet hommage, aussi, aux skaters : c'est le prolongement du corps. Et alors ce plan d'Alex par terre (pas que lui, donc), le skate en travers du corps, comme répliquant la fatale amputation (ah ce film sur la possibilité du vivant, donc sur la nécessité du corps : rien de gratuit non plus dans l'horreur, dans la mutilation, dans les échos de la guerre)… En cela le skate est avant tout adaptation au monde et à ses formes. Même rebelle. Mais la révolution et son contraire, c'est encore se définir au pied de la lettre du passé.

Alors que… Et il y aurait aussi tant à écrire sur le travail particulièrement complexe sur les ralentis, la lumière de Christopher Doyle,  le travail époustouflant sur le son, et donc la miraculeuse scène de la douche (Psychose et Les Oiseaux revécus extraordinairement par Van Sant), et bien sûr la grâce (pour le coup je ne vois pas comment contestable) de Gabe Nevins, etc… Mais il faut bien que D&D ne fasse pas systématiquement des kilomètres, pour son propre équilibre aussi.

Alors que, donc !, ce n'est pas le skate qui plongera Alex dans la vie, c'est l'écriture. Ecriture, dans un nécessaire retour à la vie. Et vie, dans un nécessaire départ de l'écriture. Dans les flammes... Et le feu danse. Et vie. Là où tout corps plongé dans l'eau ressort mouillé aurait ri mon grand-père maternel. Brûlé. Aussi.


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commentaires

D
Bonjour ! un ptit coucou !
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D
Hmm... Je dirais plutôt que c'est un gros coucou :-)
P
y sont où tes tags, que je me marre......bisous mon d&d
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D
Je suis en retard sur ce coup-là, tu sais...Enfin sur ce coup-là... Bisous :-)
S
Ben disons que la semaine dernière, dimanche était un peu le seul moment où j'ai pris le temps d'aller quelque peu sur le net... pour ce qui est de prendre l'air, je fais ça le soir, quand je peux ;-)Merci, mon Docteur du CinémaSysT
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D
Ah la la... Tape pas trop dans la réserve d'oxygène à l'hôpital, mais faudra peut-être y songer un peu. Cela dit, tu me fais trop d'honneur : aurais-tu commencé ? :-)
J
C'est aussi ce que j'aime avec ce réalisateur. Il ose. C'est de ça dont le cinéma a besoin. Des réalisateurs qui tentent de nouvelles expériences, testent  et essaient pour renouveler le genre. rélisateur à mettre de côté. C'est pas conventionnel, c'est sûr. Ca passe ou ça casse mais il a le mérite de le tenter.
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D
Bonjour Julien,Je suis bien d'accord avec toi. "Il ose" : c'est parfaitement dit, je trouve. Et il n'y en a pas tant que ça quand même... Aussi rare peut-être, et aussi précieux à mes yeux : la subversion. La constructive, j'entends. Et cest sans doute là que je tiens particulièrement à Eastwood, dont le cinéma épouse une forme plus "classique".
F
j'adore la façon que tu as de dire quelquefois l'histoire ne m'intéresse pas, la photo n'est pas géniale, le son est bof, le montage est moyen, mais j'adore ce film.La part de subjectivité, décortiquée, poussée à l'extrême, c'est tout ton blog, ça, non ?
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D
Salut toi :-)Il y a beaucoup de ça en effet. Mais sans doute aussi tout le contraire, ou tous les contraires...Enfin, j'espère : j'aime bien les contraires ;-)

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