Je tiens debout, et plutôt avec le sourire, mais je suis terriblement distrait en ce moment ; mon attention est lâche, ma concentration éphémère. Je n'arrête pas de recommencer. Je n'ai que des bribes de mon intuition pour le faire, face à mon travail, face aux films qui m'intéressent, face au Maître ignorant de Rancière que j'essaie d'approcher moins superficiellement en le gardant à portée de main. Ponctuellement, quelque chose se réenclenche, et j'ai l'impression de redevenir un peu actif, pour de bon. Puis la distraction l'emporte à nouveau. C'est fatigant, et je fume trop, mais je ne me décourage pas tout à fait. Evidemment, c'est ingrat, et c'est ingrat de continuer à "tenir le blog" ainsi. Et c'est tout le paradoxe de cette sorte de monstre qu'il représente pour moi : si je ne m'y tiens pas un minimum, même mal, même anecdotiquement, je sens que je perds comme un des derniers fils qui me tient vigilant (parce qu'il concourt, obscurément, à me maintenir actif face au cinéma, et que sans lui, je pourrais facilement re-dériver vers la pure consommation, je le pense vraiment) ; dans le même temps, il participe de mon engluement dans la toile, que je ne sais pas encore bien "gérer", dont je ne maîtrise pas le(s) fonctionnement(s), l'avidité ou la dispersion, et que j'identifie toujours comme la principale nourriture de ma distraction (même si : pas que, bien sûr). Je sens toujours une forme de "reconnexion" s'opérer en moi quand je peux prendre des vacances dans un contexte qui me coupe non seulement du travail, mais aussi d'internet. Mais je crois que si j'essayais d'être un peu radical à me couper d'internet un certain temps, dans mon quotidien réel (hors vacances), ma distraction prendrait simplement sa source ailleurs. Une autre "addiction" l'emporterait. Alors je reste face à mon monstre.
C'était marrant aujourd'hui, d'être invité par un copain à regarder cette vidéo (sous-titrée en français). Elle m'a fait du bien. Je n'aime pas tout, loin de là, et j'imagine les compromis nécessaires à ces terribles présentations "à l'américaine", mais tout de même, ce n'est pas rien. Et cela a ponctuellement à voir avec Le Maître ignorant.
Et là, tout à coup, je pense, et c'est flou, mais ce n'est pas pour faire une phrase, ou pas seulement : mon blog est mon maître ignorant. En tout cas, c'est sa meilleure part.